Entretien avec Omar Ibn Abdillah, ambassadeur de la Charte Africaine de la Jeunesse

Article : Entretien avec Omar Ibn Abdillah, ambassadeur de la Charte Africaine de la Jeunesse
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17 août 2021

Entretien avec Omar Ibn Abdillah, ambassadeur de la Charte Africaine de la Jeunesse

Salut Omar, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Je suis Omar Ibn Abdillah, jeune, noir, musulman. Le fruit de plusieurs siècles de luttes, de combats et d’espoir, je suis le descendant de Lucy ; de l’abolitionniste historique Frederick Douglass. Je viens des Présidents Thomas Sankara et Ali Soilihi ; des résistantes extraordinaires Harriet Tubman et Rosa Parks ; des activistes pacifistes Martin Luther King et Nelson Mandela.

Descendant des sportifs engagés comme Tommie Smith, John Carlos, Usain Bolt et Mickael Jordan ; des révolutionnaires Malcolm X et Angela Davis ; des poètes activistes Langston Hughes et Aimé Césaire. Je suis maintenant, demain, hier, l’avenir d’une génération, l’espoir de milliers d’africains. Je suis ce que je suis : ni toi, ni lui, je suis moi, entièrement moi, je suis l’enfant noir.

Oui, je suis jeune, africain et musulman. Je viens d’Afrique, de là-bas où la terre tellement riche, magnifique, ensoleillée, terre de rivalité, d’un amour remarquable avec un Roméo blanc et une Juliette noire. Je viens de là-bas où madame noire, blanche, jaune, rouge, marron, incarne la beauté d’un métissage ethnique vivant en harmonie et en paix. Le bonheur de notre Afrique réside dans la bonté et le respect de cette diversité. Je viens de là-bas où l’amour et l’amitié n’ont pas de frontières.

Vos mots sont inspirants et nous démontrent l’amour particulier que vous portez à l’Afrique. Que pouvons-nous savoir sur votre vie professionnelle actuelle ?

Originaire des Comores, je suis consultant économiste en stratégie de développement au sein du cabinet Roland Berger. Je suis aussi directeur de ma propre entreprise qui est l’OIA Group, primé par Tony Elumelu Fondation, la French Africa Foundation, les SDGs Awards, meilleure initiative en faveur de la mise en œuvre des ODD par les Jeunes. C’est un cabinet qui a accompagné les plus grandes entreprises de l’Afrique, des gouvernements et des partenaires au développement pour la mise en œuvre des ODD à travers le renforcement de capacités.

Je suis responsable de suivi et de l’évaluation du Plan Comores Emergent, en charge d’accompagner et d’animer le dialogue avec les partenaires au développement et le gouvernement en Union des Comores. Je gère aussi le reporting national de tous les ministères. J’interviens dans plusieurs missions de consulting que ce soit avec l’Union Européenne ou le PNUD pour l’évaluation des actions et programme de développement.

En plus de cela, j’ai des engagements panafricains. Je suis ambassadeur pour la charte africaine de la jeunesse, Obama Africa Leader, ambassadeur du Next Einstein Forum, vice-président d’ideas4action.org et fondateur de SDGs4Africa, une initiative de valorisation des actions des jeunes africains en faveur du développement.

Vous avez certainement vécu une histoire particulière. Qu’est-ce que vous pouvez nous dire sur votre parcours personnel ?

Pour cela, on va remonter un peu l’histoire. Je suis né à Madagascar d’un père et d’une mère comoriens. J’ai fait mon cursus scolaire aux Comores. J’étais très médiocre jusqu’en classe de 4e. Tout a basculé dans ma vie après ma rencontre avec un ami, qui lui était déjà à l’université. Durant les vacances de la 4e à la 3e, il m’a passé des livres qu’il me demandait de lire.

Par ma passion pour la lecture, je suis passé de l’élève médiocre que j’étais jusqu’en classe de 4e, à un élève brillant en classe de 3e. J’ai même été 1er national de tout le pays au Brevet. La leçon à retenir de cette histoire est qu’il faut toujours croire en soi-même. Nous sommes capables de choses que nous-mêmes ne savions pas. Il suffit juste d’un peu de confiance en soi. Ni votre intelligence, ni votre origine ne fera la différence, mais plutôt votre foi.

Et après votre baccalauréat ?

Après le Baccalauréat j’ai mené de petites activités qui m’ont aidées à avoir de l’argent et rejoindre Madagascar. Aussi avec l’aide financière de ma mère, j’ai commencé les études supérieures à Madagascar en faculté de médecine. Après 3 mois en médecine, j’ai migré en faculté de sciences économiques.

Je voudrais en particulier attirer l’attention sur un fait que j’ai vécu, à savoir la perte d’identité. J’avais vraiment honte de venir d’une petite famille pauvre. Je me suis inventé une histoire, une vie d’un enfant de famille aisée ; tout cela pour me faire accepter. C’est ainsi que la jeunesse africaine d’aujourd’hui vie dans un rêve, une utopie.

On se doit d’accepter qui on est, nos conditions et nos origines, soyons vraiment nous-même, ne nous laissons pas berner par l’identité occidentale car en notre identité africaine réside une force de plusieurs siècles. Mais au final j’ai du revenir à la vérité compte tenu de moments difficiles que je vivais au niveau financier.

Dans cette période, j’ai déposé une centaine de CV dans des entreprises. Mais aucune d’elle ne m’a contacté à part un Call Center en 2015.

Vous êtes jeune avec un profil atypique de leader. Que pouvons-nous savoir sur le début de votre parcours professionnel et associatif ?

Ma vie professionnelle a commencé avec mon recrutement dans le Call Center. Ma vie associative dans cette même période. J’ai été au Rotary, à la Jeune Chambre Internationale (JCI) et au Lion’s Club. J’étais beaucoup plus actif à la JCI et président de différentes associations d’étudiants. Très actif et engagé, j’ai animé plusieurs formations.

Grâce à mes engagements citoyens, plusieurs opportunités se sont ouvertes à moi ; des formations à l’UNITAR, à Harvard Business School, à l’Institut de formation du FMI et de la Banque Mondiale… qui m’ont poussé à m’engager concrètement dans le développement durable.

En plus de cela, j’ai co-fondé la même année 100startups.co, un incubateur avec pour vision d’accompagner 100 projets d’entreprise en Madagascar. Dans cet élan d’accompagner l’entrepreneuriat, j’ai organisé jusqu’aujourd’hui’ 24 Startups Weekend en tant que facilitateur et formateur de Techstars.com. J’ai contribué à la création de plus 200 entreprises et la mobilisation de plus de 1M d’Euros pour accompagner l’écosystème entrepreneurial.

L’an dernier, j’ai lancé aux Comores le Global Entrepreneurship Network Comoros pour solidifier le parcours du jeune entrepreneur. De plus, j’ai travaillé dans plusieurs grandes entreprises. Après cela, j’ai commencé à travailler comme formateur Freelance, mais aussi à dispenser des formations gratuites aux associations. Cela m’a permis de gagner en expérience et de m’affirmer en tant que formateurs de renom.

N’hésitez pas à vous engager pour le bien de votre prochain car votre tour viendra toujours.

Au vue de l’accompagnement stratégique que vous apportez à la jeunesse, quelle est votre vision de l’Afrique à court et long terme ?

Ma vision pour l’Afrique dans les 5 prochaines années est d’agir localement pour atteindre un développement continental. Je compte m’engager aux côtés de nos gouvernements pour un impact local fort. Si nous agissons tous dans nos pays, nous aurons forcement une action continentale remarquable. De plus, je projette dans les 10 prochaines années accompagner 54 millions de jeunes à travers la mise en place de l’Acte Africain de la Jeunesse, un plan d’action fait avec, par et pour les jeunes. Je suis à 12 000 actuellement.

Pour finir, quel message pouvez-vous adresser à la jeunesse africaine ?

Pour finir, j’ai trois messages à l’endroit de la jeunesse.

Le premier message est que nous devons nous poser les bonnes questions. Qu’est-ce je fais de mon quotidien et de ma vie ? Je trouve que la jeunesse perd beaucoup son temps. Posons-nous la question de savoir ce que nous faisons de nos 24h par jour. Le parcours pour atteindre nos objectifs se divise en trois étapes. La première est l’information : lire et écouter. La deuxième étape est la formation : apprendre et découvrir. La dernière étape est le développement : passer à l’action.

Le deuxième message est qu’il faut se créer un écosystème de qualité. Quel est ton environnement ? Avec qui tu marches ? Il faut t’entourer de gens qui font la même chose que toi ; de personnes qui vont te motiver à te développer.
Le dernier message est d’être panafricain. Savoir que nous venons de l’Afrique et que nous devons nous battre pour notre continent. Nous devons garder notre identité et rester solidaire.

Merci cher Omar. Nous sommes ravi pour cet entretien que vous avez bien voulu nous accorder.

IMPACT AFRIK

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Commentaires

Badroudine
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Pour le novice que je suis, je dis bravo à Omar et le remercie pour toutes ces informations pertinentes, nécessaires et encourageantes.